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Mgr Willy Romélus : un pasteur de vérité et de justice, un héritage pour l’Haïti d’aujourd’hui

La voix de Mgr Joseph Willy Romélus s’est éteinte le 11 août dernier, à l’âge de 94 ans, dans sa commune natale d’Arniquet, département du Sud d’Haïti. Mais son écho, forgé dans les luttes pour la dignité et les droits humains en Haïti, continue de résonner bien au-delà des murs des églises et des cœurs qu’il a conquis et unifiés par sa foi active.

Un parcours façonné par l’engagement

Ordonné prêtre en 1958, formé à la théologie morale à Rome et à la pastorale sociale en France, Mgr Romélus est nommé évêque de Jérémie en 1977. Dans une interview accordée à Radio Tèt Ansanm et redifusée, pour l’occasion par J-COM, un média local, il soulignait que « cette charge n’est pas l’aboutissement d’une ambition personnelle, mais la volonté de Dieu ». Dès sa prise de fonction, celui qui jusqu’au terme de sa vie fut gardé évêque émérite de Jérémie, a engagé un travail pastoral conjuguant foi, éducation et développement.

Ses priorités ont paru évidentes l’église qu’il dirigeait : alphabétiser les adultes, ouvrir des écoles paroissiales, améliorer l’accès aux soins de santé. D’où, entre autres réalisations, l’Ecole Supérieure Catholique de Droit de Jérémie (ESCDROJ) et l’Ecole des Infirmières Notre-Dame du Perpétuel Secours (EINDPS), logées littéralement à la même enseigne, qui cristallisent cette vision. À partir de 1996, par suite d’une vision ou d’un appel spirituel, comme il témoignera plus tard, il passe ses instructions pour la construction du Sanctuaire Notre-Dame de la Médaille Miraculeuse, érigée à Source Dommage, Jérémie. Il y supervise les travaux. Ce nouveau sanctuaire, quoique inachevée, symbolise une foi incarnée dans la pierre, certes, mais surtout dans les cœurs.

Face aux dictatures, une résistance pacifique

Dans les années sombres de la dictature des Duvalier et des régimes militaires postérieurs, Mgr Romélus prend position. Ce qui met sa vie en péril. En raison de son aura sur les esprits grand’anselais, l’Evêché de Jérémie est assiégé par des jeunes et des adultes, écoliers, acteurs de la société civile et professionnels, qui pendant plusieurs jours et plusieurs nuits ont veillé pour prévenir d’éventuelles atteintes à la vie de leur leader. En réalité, il a survécu à environ une dizaine de tentative d’assassinats.

Plus tard, Mgr Romélus soutient la Constitution de 1987, dénonce les exactions et, après le coup d’État de 1991, appelle à la résistance pacifique. Cette ligne de fermeté lui vaut le Prix européen des droits de l’homme en 1994 et une nomination au Prix Nobel de la Paix, en 1995. Et pour cause, car pour lui, la foi n’est jamais un refuge passif. Elle doit être une source d’action : « La mission de l’Église est de défendre la vie et la dignité, même quand cela coûte », disait-il.

Le choix des solutions

Ce qui distingue Mgr Romélus n’est pas seulement sa dénonciation du mal, mais comme Explicite Net se consacre à le faire dans les broussailles et les turbulences actuelles, sa capacité à proposer et incarner des solutions concrètes. Dans un pays fracturé, l’homme dont le cœur était partagé entre la ville d’Arniquet et sa ville d’adoption, Jérémie, donc entre le Sud d’Haïti et la Grand’Anse, a misé sur :

  • La jeunesse : il les intègre à la vie paroissiale, forme des leaders et les envoie servir dans les zones reculées, autrefois oubliées et marginalisées.
  • La prière et la formation spirituelle : ses retraites, rencontres diocésaines et moments de réflexion ont renforcé la cohésion sociale. Il a su, en effet, rassembler, unifier les cœurs des catholiques, protestants et vodouisants dans des pèlerinages, des moments de prières et de foi active en un chœur sublime pour le renouveau d’Haïti.
  • L’action sociale : Il a su dynamiser les prêtres, mobiliser les paroisses pour répondre aux besoins urgents de la reconstruction après des catastrophes et de la lutte contre l’analphabétisme. Sous son leadership, l’église catholique, du moins dans la Grand’Anse, a changé de visage en devenant par exemple plus sociale.
  • Le dialogue : Certes, Mgr Romelus ne faisait pas l’unanimité. Il le savait. Mais par sa capacité de communication, son esprit ouvert au dialogue, même avec ses pires détracteurs, il parvenait à désarmer les rancœurs. Le fait est qu’il était convaincu que la paix ne se bâtit pas sur la victoire d’un camp, mais sur l’écoute mutuelle. C’est ainsi que certains ennemis d’hier en sont venus à adhérer par la suite à sa vision d’un Haïti où les pauvres, les déshérités ont leur part au bien-être collectif.

Un héritage toujours actuel

Retraité depuis 2009, il n’a cessé d’encadrer prêtres et fidèles, de dénoncer les ingérences étrangères qu’il jugeait néfastes, et de plaider pour l’unité nationale. Les médias du monde entier guettaient ses rares interventions. En 2012, lors de la présentation de son livre Espérer contre toute espérance, il résume toute sa vie : croire à la possibilité d’un avenir meilleur, même contre les vents contraires.

Dans un Haïti toujours en quête de repères, son héritage invite à repenser le leadership : un leadership qui ne se contente pas de condamner, mais qui construit ; qui ne cède pas au désespoir, mais qui crée des chemins d’espérance.

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