Les sièges restent vides et les pistes désertes : Port-au-Prince est désormais une capitale presque inaccessible par voie aérienne. La « Federal Aviation Administration (FAA) » américaine vient de prolonger jusqu’au 7 mars 2026 l’interdiction des vols commerciaux vers la ville, invoquant des « risques graves et persistants » liés à la présence de groupes armés autour de l’aéroport et le long des couloirs d’approche.
Pour les compagnies aériennes, la décision est autant sécuritaire que technique. Un vol vers Port-au-Prince aujourd’hui oblige un appareil à traverser un espace aérien non contrôlé, à basse altitude, et donc à portée directe d’armes automatiques. La moindre manœuvre de descente vers la piste place l’avion et ses passagers dans une trajectoire extrêmement vulnérable.
Les faits confirment le danger : depuis un an, plusieurs avions et hélicoptères civils ont été touchés par des tirs d’armes légères. Trois avions de ligne américains ont même essuyé des impacts lors de leur approche. Si aucun crash n’est à déplorer, un membre d’équipage a toutefois été blessé, preuve du caractère concret de la menace.
Afin de réduire l’exposition au risque, la « Federal Aviation Administration (FAA) » n’autorise le survol de Port-au-Prince qu’au-dessus de 10 000 pieds (environ 3 000 mètres), une altitude bien trop élevée pour amorcer une quelconque manœuvre d’atterrissage.
Sur le terrain, les conséquences sont immédiates. Les ONG, les équipes médicales, les entrepreneurs et les familles de la diaspora doivent désormais rallier Haïti via des aéroports secondaires comme ceux de Cap-Haïtien, des Cayes ou de Jérémie. Ces liaisons alternatives rallongent considérablement les temps de voyage, augmentent les coûts et compliquent drastiquement la logistique humanitaire. Acheminer des médicaments ou évacuer un patient en urgence relève désormais du casse-tête.
Les six aéroports secondaires autorisés aux compagnies américaines (Cap-Haïtien, Port-de-Paix, Pignon, Jérémie, Jacmel et Antoine-Simon aux Cayes) tournent à pleine capacité, mais leurs infrastructures ne peuvent absorber le rôle central qu’occupait Port-au-Prince. De plus, les vols humanitaires doivent eux aussi composer avec des contraintes techniques majeures : la longueur des pistes, la disponibilité du carburant et la sécurité au sol restent des défis quotidiens.
Pour l’instant, aucun horizon de normalisation ne se dessine. Tant que le contrôle aérien de la capitale restera théorique et que les zones environnantes demeureront aux mains des gangs, le ciel de Port-au-Prince restera fermé. Tant que les armes parleront plus fort que les contrôleurs aériens, la ville restera isolée.
Chaque jour qui passe sans accès direct à la capitale fragilise un peu plus l’économie, retarde les secours et sépare les familles. Le rétablissement des vols ne dépend plus de l’aviation, mais bien d’un retour à l’ordre, sans lequel le cœur d’Haïti restera hors de portée, par la terre comme par les airs.